Avignon, 24 juin 2024 - Dans une atmosphère chargée d’histoire et de culture, le Festival d'Avignon, dirigé par Thiago Rodrigues, a lancé un appel fervent et urgent à faire barrage contre l'extrême droite. Lors d'une conférence de presse, en présence de Cécile Helle, Maire d'Avignon, Françoise Nyssen, Présidente du Festival d'Avignon, Tiago Rodrigues, Directeur du Festival d'Avignon, Laurent Domingos, Co-Présidents d'Avignon Festival & Compagnies, Serge Barbuscia, Président des Scènes Permanentes d'Avignon, et Laurent Rochut, directeur de la Factory et vice-président d'Avignon Festival & Compagnies, les inquiétudes profondes ont été exposées, mettant en lumière les raisons claires pour lesquelles les acteurs de la culture appellent à une mobilisation citoyenne face à une menace politique croissante.
Thiago Rodrigues (T.R.), directeur du Festival d’Avignon, n’a pas mâché ses mots en appelant à la défense des valeurs démocratiques face à la montée de l'extrême droite. « Je pense que l'appel à faire barrage à l'extrême droite et le faire vraiment, c'est la défense des valeurs démocratiques, c'est la défense de liberté et des droits essentiels défendus par la démocratie », a-t-il déclaré. Selon lui, il s’agit d’une question de principe et de refus de soumettre la vie des gens à des expérimentations extrémistes.
Le contexte européen a été évoqué pour rappeler les conséquences des politiques d'extrême droite déjà en place dans certains pays, comme la destruction des services publics. « La destruction, dans ce cas-là, qui nous concerne peut-être plus particulièrement, nous, les acteurs de la culture, c’est la question de défendre encore cette aventure de quatre-vingts ans de décentralisation et de démocratisation de la culture et des arts en France », a-t-il expliqué.
Un point crucial de ce débat est le régime d’intermittence, qui soutient les artistes et techniciens du spectacle vivant en France. Ce système unique en son genre, souvent pris comme modèle à l’international, est menacé par l’ascension de l’extrême droite. « Un festival comme celui d'Avignon ne serait tout simplement pas possible sans un régime comme celui de l’intermittence, et cela serait certainement mis en cause », a ajouté T.R.
Laurent Domingos a souligné l’absence de défense de l’intermittence de la part des politiques d’extrême droite, indiquant même des positions opposées. « Il me semble naturel, quand on défend les cultures du vivant, la diversité, la tolérance, et l'universalisme, d'appeler à faire barrage à l'extrême droite », a-t-il affirmé.
Le rôle des journalistes a également été souligné. Les médias sont invités à interroger le Rassemblement National sur leurs programmes culturels et éducatifs, souvent absents des débats actuels. « Je vous invite, mesdames et messieurs les journalistes, à interroger le Rassemblement National et ses candidats sur leur programme culturel. Il est très absent des débats et des questions des journalistes ces temps-ci, idem pour l'éducation », a exhorté Laurent Rochut.
L’histoire personnelle de Thiago Rodrigues résonne fortement dans ce contexte. Fils de journaliste exilé pour échapper à la dictature fasciste au Portugal, il voit dans la défense des valeurs républicaines une mission personnelle et professionnelle. « Je devais ce barrage à l'extrême droite à mon père », a-t-il déclaré avec émotion.
Les inquiétudes budgétaires ont également été abordées. Bien que le Festival d'Avignon n’ait pas encore subi de coupes directes, la diminution des budgets alloués au ministère de la Culture affecte l’ensemble des arts vivants en France. « Tout coût budgétaire qui a un impact sur les arts vivants et les services publics de culture en général nous affecte directement parce que le festival d'Avignon collabore et coopère avec tout le monde culturel de la France », a expliqué T.R. La qualité et la capacité de réalisation du festival en souffrent lorsque ses partenaires sont affaiblis par des réductions budgétaires.
Cependant, le débat sur les coupes budgétaires est distinct de la menace de l'extrême droite. « Une autre chose, c’est la possibilité de prise du pouvoir par l'extrême droite qui remettrait effectivement en question l'existence même de ces services publics de culture », a précisé T.R. Le premier débat se fait dans un cadre démocratique, tandis que le second menace de déstabiliser ces bases mêmes.
Le festival d’Avignon se prépare activement à résister à ces menaces. Une manifestation est prévue pour le 29 juin, portée par l’intersyndicale de la branche culture, dont la CGT. « Nous accueillons et dialoguons constamment avec ces forces syndicales, politiques et de la société civile ».
L’appel du Festival d’Avignon est clair : la participation citoyenne est essentielle. « Venez au festival d'Avignon dès le 29 juin et faites acte de résistance politique en allant voter les 30 juin et 7 juillet prochain », a encouragé T.R. La conférence de presse a également souligné l’importance de la culture et de l’art en tant que formes de résistance et de réflexion collective.
Cette année, le Festival d'Avignon se positionne fermement pour défendre les principes fondamentaux de la démocratie et de la république. Cet appel à la mobilisation citoyenne est une invitation à tous les Français à s'engager, à voter, et à protéger les valeurs qui ont façonné la nation. Les paroles de Thiago Rodrigues rappellent l'importance de chaque voix dans la construction d'une société juste et équitable.
Cette édition du festival est fortement marquée par le contexte politique actuel, où le patrimoine et l'art occupent une place centrale dans la société. Les artistes de divers horizons ont travaillé tout au long de l'année pour donner vie à cette saison culturelle unique. Afin de rendre cet événement accessible à un public plus large, des billets à prix réduits ont été mis en vente sur le site officiel pour la première semaine du festival, période cruciale pour la participation citoyenne. Au total, 5 000 places sont disponibles à des tarifs réduits, permettant au public de participer pleinement à cette semaine marquée par des actes volontaires et engagés.
Le Festival d'Avignon est plus qu'une simple célébration de la culture; c'est une déclaration d'amour à l'art. L'édition 2024 doit retentir dans les années à venir comme un symbole d'union et de solidarité. « Laissez la lumière allumée à partir du 29 juin : on crée, on diffuse, on partage. C'est une façon de voir le monde, de raconter. Ce qui en est le but depuis 60 ans », déclare T.R. Cette année marque un tournant où le festival défend ardemment le spectacle vivant et la lumière de la culture. « C'est notre devoir de rêver et de rendre le monde plus raisonnable, et cela commence dans les théâtres où nous repensons le monde », ajoute-t-il.
Depuis sa création en 1947 par Jean Vilar, le Festival d'Avignon a été un lieu de débat et d'expression, rassemblant des voix diverses dans un dialogue ouvert. Chaque chemin mène à Avignon, offrant au spectateur un rôle actif et vital. « Grâce à Jean Vilar, l'évasion et la culture du théâtre ont pris une dimension populaire », souligne T.R.
Cependant, les circonstances politiques actuelles ont eu un impact sur la fréquentation du festival. Alors que la vente de billets était en hausse par rapport aux années précédentes, l'annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale a entraîné une baisse notable des ventes. Malgré cela, le festival reste une aventure de délocalisation et de démocratisation de la culture en France, s'efforçant de rendre l'art accessible au-delà des cercles parisiens élitistes.
Cette démarche s'inscrit dans une tradition d'autocritique constructive, inspirée par Jean Vilar. En repensant constamment les valeurs de la culture, le festival continue de promouvoir une vision démocratique et inclusive de l'art. « Sans autocritique, il n'y aurait pas de démocratisation de l'accès à la culture, pas de maisons de jeunesse, pas de festivals en région », rappelle T.R. C'est cette capacité à se remettre en question et à agir collectivement qui a permis au Festival d'Avignon de rester pertinent et engagé depuis tant d'années.
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