Publié par : Marie Christine V. et Mathilde P., le 04/07/2024

Jean Zay - Théâtre - Critique

Titre : Jean Zay, l’homme complet (2024)
Dates : Du 29 juin au 21 juillet Relâche le lundi
Horaires : 11h30
Durée : 1h15
Lieu : Episcène
Genre : Théâtre contemporain
Distribution : Texte, adaptation et jeu de Xavier Béja MES Michel Cochet


Avis de Mathilde (2024)

Dans la pénombre, un halo de lumière prend forme. Dedans, un homme fait les cent pas, tel un lion en cage. L'histoire de la pièce de Jean Zay commence au moment de son incarcération à Marseille, où la bise glaciale transperce l'ancien ministre de l'Éducation nationale et de la Culture sous le régime de Léon Blum. C'était avant, en 1940, c'est Pétain qui est aux commandes, et Jean Zay fait partie de ces hommes condamnés à tort, dont on a voulu effacer la trace et rayer de l'histoire.

Ce seul en scène est une pièce intimiste où l'acteur a réduit le décor et la mise en scène à leur minimum : un bureau, une chaise, un porte-manteau, et un drap blanc où seront projetées des images et des documents filmés de la Seconde Guerre mondiale. C'est l'histoire injuste d'un homme simple qui s'est battu pour la France, au pouvoir ou sur le terrain, comme en Afrique. La pièce est brute mais forte en puissance et en révélations.

Au fur et à mesure, l'homme se dévoile, nous livre ses souvenirs, ses avancées majeures pour l'époque : un homme en avance sur son temps, qui a fait grandir la France par ses programmes éducatifs et culturels (CNRS, théâtres en province, les bases de l'ENA et du festival de Cannes). Et dont, ironiquement, le ministère de Pétain mettra en place certaines idées alors que l'ancien ministre est toujours emprisonné.

À travers lui, nous découvrons le monde carcéral vu de l'intérieur. De Marseille, il est envoyé à Riom, mais, bien que les prisonniers changent, les expressions et les attitudes restent les mêmes : maigres silhouettes frêles qui ne sortent de leur cellule que pour la douche. Grâce à son changement de statut en “régime politique”, il aura une petite cour et un poêle à charbon pour se chauffer. Dans ce monde sombre et froid, le moindre signe de nature et de vie a son importance : un oiseau qui lui rend visite, les rayons du soleil, son carré de jardin dans la cour.

Avec lui, la solitude prend de l'ampleur et surtout son sens : Jean Zay se retrouve seul avec lui-même, cherchant sa place : “La vie pour moi est devenue un monde de coulisses”. Il a beau se retrouver seul, cela n'affecte en rien son désir d'écrire, de philosopher, de se livrer. Il apprend surtout à se connaître, à “vivre au ralenti”, à se découvrir.

C'est en prison qu'il écrit son journal de captivité, repris et mis en scène par l'acteur de Jean Zay : Xavier Béja. Je salue la performance de l'acteur qui nous montre certes des moments froids, durs mais réalistes. Avec lui, on a une nouvelle vision globale sur la grande Histoire à travers la petite histoire de Jean Zay. 2024 est le moment parfait pour apprendre à le connaître, car c'est le 80e anniversaire de sa mort. Aujourd'hui, sa vision du monde serait plus que bénéfique à la société car, comme De Gaulle, il a su insuffler un nouvel élan, mais sur le plan culturel et éducatif.

Nous regrettons qu'il fasse partie de ces hommes que l'histoire a voulu oublier mais qui, grâce à cette pièce, reprend vie. Le découvrir, c'est entrer dans l'intimité d'un personnage d'une grande humanité et d'une grande sagesse, une belle leçon d'humilité qui mérite d'être connue.

Avis de Marie-Christine (2023)

"Jean Zay" est une pièce absolument remarquable qui rend hommage à la vie et à l'héritage de cet homme politique historique. La pièce explore les différents aspects de la vie de Jean Zay, mettant en lumière son engagement politique, sa résistance à l'oppression nazie et son assassinat tragique.

La mise en scène épurée de Michel Cochet est convaincante et convaincue. Elle permet de mettre en valeur les mots et l'esprit de Jean Zay. La création lumière renforce l'atmosphère et souligne avec subtilité les émotions du récit. Xavier Béja, dans le rôle principal, captive le public avec son interprétation caméléon. Il incarne Jean Zay de manière attachante, révélant à la fois sa grandeur et son côté sensible. Son jeu d'acteur et la mise en scène épurée contribuent à renforcer l’impact émotionnel sur le public qui reste suspendu au déroulement de la pièce.

La pièce se concentre sur le journal intime de Jean Zay, écrit pendant sa détention. C'est un document d'une valeur historique inestimable, mais c'est aussi un livre essentiel en raison de la qualité de sa langue, de sa sensibilité et de son intelligence visionnaire. Xavier Béja nous offre un moment précieux qui nous permet de traverser avec lui ce document exceptionnel. Il nous fait ressentir l'émotion et la difficulté de vivre l'incarcération de Jean Zay, tout en évoquant les pages et les films qui témoignent de son œuvre importante et précieuse en tant que ministre et de la période troublée de la guerre qu'il a vécue intensément et sans compromis.

La pièce est extraordinaire dans sa capacité à capturer l'intelligence et la sensibilité de Jean Zay. Elle nous plonge dans son monde, dans ses pensées les plus profondes, et nous invite à réfléchir sur les enjeux politiques et sociaux de l'époque et les conséquences de la guerre en France. La pièce est à la fois intelligente et sensible, nous transportant à travers les différentes facettes de la vie de Jean Zay et nous rappelant l'importance de son message humaniste.

En conclusion, "Jean Zay" est une pièce exceptionnelle qui rend hommage à un homme politique historique. La mise en scène convaincante, l'interprétation remarquable de Xavier Béja et la profondeur du récit nous captivent du début à la fin. La pièce offre une réflexion profonde sur l'engagement politique, la résistance et la lutte pour la vérité et la justice. C'est une excellente expérience théâtrale à ne pas manquer, à la fois émotionnelle et intellectuellement stimulante.
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