Publié par : Peter B., le 25/07/2024

Chocolat Piment - Théâtre - Critique

ON NE SE VOYAIT PAS BEAUCOUP, LÀ AU MOINS ON SAURA POURQUOI

UNE COMÉDIE NOMMÉE AUX MOLIÈRES

Depuis que le théâtre existe, la famille, ou du moins les relations intrafamiliales, a toujours été une grande source d'inspiration pour les auteurs et les autrices dramatiques. De Sophocle à Giraudoux, de Shakespeare à Harold Pinter, en passant par Molière, Corneille, Jean-Claude Grumberg, François Cervantès et tant d’autres encore, la famille a été et reste une source inépuisable d’histoires, d’irréalismes, de rêves non aboutis, de désirs accomplis et, souvent, de profondes frustrations de l’enfance traduites pour les adultes.

Christine REVERHO a-t-elle conçu son écriture de "Chocolat Piment" de la sorte ? Je n’en ai aucune idée, mais ce qui se passe dans cette comédie grinçante en est le miroir de ce que l’on peut vivre dans beaucoup de familles. Un père, déjà un peu âgé mais pas trop, veuf et vivant seul dans la maison familiale. Deux filles : l’aînée, travaillant dans l’immobilier, cherche désespérément l’amour de sa vie sans le trouver et, finalement, s’en sort plutôt bien. La cadette, mariée à un homme - le gendre, genre goujat - qu’elle n’aime plus mais qu’elle fait semblant d’aimer pour ne pas donner le change, jusqu’à un certain point.

L’anniversaire de Papa, en plein hiver, et ce petit monde se réunit pour fêter ça. Comme chaque année. Rien ne dévisse vraiment et, en même temps, quelque chose remonte à la surface : les amours du père avant son mariage avec la mère décédée, les amours clandestines de la mère lorsque le père devait s’absenter, l’aînée qui fouille dans le passé des deux parents et la cadette, malheureuse comme une pierre, qui transfère l’amour qu’elle n’a plus pour son mari sur leur fille. Que l’on ne voit jamais. Elle est ailleurs, déjà presque étouffée.

Le père reste stoïque, même confronté à un passé qu’il espérait ne plus jamais revoir remonter à la surface. Et pourtant… Comme dans un autre spectacle, "La Parenthèse du Mimosa", l’acteur Jean-David STEPLER se trouve confronté à son passé et joue avec une justesse magistrale. Dans "Chocolat Piment", on le voit vieillir tout doucement, se retirer en lui-même en faisant des Sudoku pour ne plus voir le monde tel qu’il est. Et, en même temps, il a un regard rempli d’émotions et de douceur vis-à-vis de ses filles, et il sait transmettre au public cette émotion presque palpable.

Le texte d’ailleurs a son rôle également : des phrases bien ciselées, des répliques au cordeau, parfois très drôles mais aussi pleines de venin. Et le chocolat piment là-dedans ? Un gâteau d’anniversaire en l’honneur du père, et ce n’est vraisemblablement que le gendre goujat qui le mange.

Difficile, avec cette comédie un peu grinçante, de souhaiter un joyeux anniversaire de bon cœur. Le public ne s’y est pas trompé, car "Chocolat Piment" a eu le succès qu’il méritait durant ce Festival Off 2024.
Partager sur : Facebook - X (Twitter) - Linkedin
Connectez-vous pour pouvoir écrire un commentaire
Autres informations