Français :
Cette année, nous avons eu la chance et le plaisir de découvrir pour la toute première fois l’opéra de Yu, tout droit venu de Chine, à l'espace Pasteur, avec le spectacle “Sonorités de Yu”. Issu de la vallée du Henan, cet art ancestral est propre à sa région du centre-est de la Chine. Mettant à l'honneur l'art traditionnel, la troupe “Kaifeng Suzhen” allie merveilleusement bien opéra, théâtre, danse et esthétique. Depuis sa création en 2022, la troupe propose des performances de grande qualité, ayant pour but de partager et démocratiser la culture de l’opéra du Henan, de style Chen. En s’appuyant sur le répertoire traditionnel, les pièces mettent en avant le patrimoine et l’histoire de cette région chinoise. Cette année, les artistes de la troupe ont voulu présenter trois pièces représentatives de leur art : “Ramasser le bracelet en jade”, “L’épée cosmique” et “Le palais de Fan Wang”.
La première pièce, jouée du 3 au 8 juillet, raconte l’histoire d’une jeune fille qui brode devant la maison de sa famille pauvre, passant le temps pendant que sa mère part faire sa prière au temple. Un jeune homme noble, passant dans le coin, tombe amoureux de la jeune fille et essaye de trouver un prétexte pour l’aborder. Voyant que cela ne mène à rien, il décide de laisser tomber son bracelet en jade, pensant que si elle le ramasse, cela sera un gage d’amour et de mariage. Son stratagème fonctionne, la jeune fille ramasse le bracelet, mais ignore que toute la scène a été observée par la marieuse du village. Cette dernière décide alors de mettre son grain de sel en arrangeant les commodités.
La deuxième pièce, jouée du 10 au 15 juillet, nous conte l’histoire triste d’une famille riche ayant perdu des membres suite au vol de l’épée cosmique et de la vendetta qui s’ensuit entre les deux ministres au palais et l’empereur. La jeune veuve restante suscite l'intérêt de l’empereur qui, touché par sa beauté, décide d’en faire sa concubine avec l’accord du père de la fille qui promet de l'emmener au palais. La jeune femme désapprouvant cet arrangement trouve des prétextes pour empêcher cette union mais n’y parvient pas. Elle a alors l’idée, grâce à sa servante, de feindre la folie auprès de son père, évitant ainsi le régime de tyrannie.
Le troisième spectacle, du 16 au 21 juillet, raconte l’histoire d’amour entre une jeune noble et un jeune chasseur pauvre qui se rencontrent au temple. Tombée sous le charme, la jeune femme tombe “en mal d’amour” et souffre de ne pas revoir ce bel inconnu. Le noble frère, possédant déjà une épouse, tente d'appâter la mère du chasseur qui doit lui rembourser son prêt en l’arnaquant. Celle-ci n’est pas dupe et décide de se venger en envoyant son fils à la noble demeure afin de tuer le vieil homme. Le plan tombe à l’eau grâce à l’intervention de la belle-sœur et épouse du noble. Les deux amants finissent par se marier.
On remarque que les prestations portent sur des thèmes importants tels que l’amour, la victoire du bien sur le mal, des histoires de trahisons et de stratagèmes, la méchanceté des gens, et le pouvoir acquis grâce à son rang social. Les sujets étant divers, cela ravit le public de tout âge, qui a le plaisir de découvrir tout le panel artistique du répertoire. On a ainsi le plaisir d’assister à toutes les maîtrises de cet art (“les manches d’eau”, “porter des vêtements habilement”, “lancer une grande tresse”, “danser avec un éventail”) qui se résument au chant et aux mouvements des yeux et du corps. Nulle parole n’est échangée, les personnages chantent pour communiquer et parlent avec le regard, les gestes, les mimes. Ceux-ci appartenant au langage universel, tout le monde peut comprendre ce qu’il se passe sur scène : par exemple, que le personnage ouvre une porte, le fait d’être fatigué et de bailler, feindre la folie, etc. Pendant ces trois semaines de festival Off, nous avons ainsi pu avoir l’opportunité de découvrir ces trois différents spectacles mettant en scène l’artiste principale Wu Suzhen, très connue dans son pays. Elle joue ainsi dans chaque pièce le rôle de femme vertueuse, femme espiègle et vive. C’est elle qui dirige l’école de théâtre, actrice de première classe nationale et titulaire d’un master en arts de la performance de l'Académie d’opéra de Chine. Elle se distingue par son talent et son aura éclatante sur scène.
Nous avons pu poser quelques questions à Wu Suzhen afin de mieux connaître cet art méconnu en France mais si populaire en Chine qu’il suscite l'admiration de tous. Cette jeune femme pratique le théâtre depuis l’âge de 12 ans à raison de 10 heures par jour, dont une demi-heure consacrée uniquement aux déplacements sur scène en “petits pas” (façon différente de marcher et de déambuler selon le sexe et la classe sociale du personnage). Il n’y a pas que de la danse sur scène mais également du chant, ce qui demande un entraînement très exigeant et compliqué, allant au-delà de l’excellence. Lorsque les jeunes artistes sont en apprentissage, les autres matières leur sont également enseignées telles que la philosophie, l’histoire de la Chine, les mathématiques, etc. Ils se lèvent vers 5 heures du matin et finissent leurs journées à 22 heures. Comme cet art met la tradition chinoise à l’honneur, les parents de Wu Suzhen sont fiers de leur fille ; il y a un regard très respectueux vis-à-vis de cette pratique.
La jeune génération est de plus en plus attirée par cet art, surtout dans les petits villages et ce, pour plusieurs raisons. Comme l’opéra de Yu redonne vie aux poèmes et à l’Histoire enseignée à l’école, les jeunes sont ravis de les découvrir sous une autre forme d'expression. Il y a aussi le maquillage et les costumes, qui sont juste magnifiques et époustouflants, et qui séduisent également. Comme c’est leur culture traditionnelle qui est mise en avant, les Chinois en sont fiers. Et pour finir, le théâtre reste de l’art vivant, à l’inverse du cinéma, où tout se passe en direct sous leurs yeux.
Enfin, les habits et accessoires diffèrent d’un personnage à un autre, notamment leurs chaussures qui sont de différentes hauteurs et styles ; nous nous sommes donc demandés pourquoi. Wu Suzhen nous a répondu que cela dépendait de la condition sociale des personnages : les femmes portent des chaussons brodés de pompons, alors que les hommes mettent des chaussures à talon, d’autant plus s’ils occupent un poste noble tel que ministre. En somme, cela représente le rang social, l'apparence différant également selon l’âge de celui qui les porte.
Nous avons été en admiration face à l'immersion dans l’opéra de Yu, un art à plusieurs facettes. Les artistes s’épanouissent sous la direction de Wu Suzhen, vedette principale de la troupe depuis 2022, et cela n’est pas prêt de s’arrêter. Face à la montée en puissance des nouvelles technologies et de la modernisation du monde actuel, nous sommes ravis de voir que le théâtre reste un art vivant qui ne cesse de passionner petits et grands. Le chant, la comédie, la délicatesse des gestes, la noblesse des thèmes abordés font des “Sonorités de Yu” un art exceptionnel unique au monde dont nous ne sommes pas prêts de nous lasser ! Merci et bravo à toute l’équipe et à Charlotte Calmel qui nous ont présenté ces magnifiques coutumes.
English :
This year, we had the chance and pleasure of discovering for the very first time the Yu opera, straight from China, at the Pasteur space, with the show “Sounds of Yu”. Originating from the Henan Valley, this ancestral art is unique to its region in central-eastern China. Highlighting traditional art, the “Kaifeng Suzhen” troupe wonderfully combines opera, theater, dance, and aesthetics. Since its creation in 2022, the troupe has offered high-quality performances aimed at sharing and democratizing the culture of Henan opera, in the Chen style. Drawing on the traditional repertoire, the pieces highlight the heritage and history of this Chinese region. This year, the troupe’s artists wanted to present three representative pieces of their art: “Picking Up the Jade Bracelet”, “The Cosmic Sword”, and “The Palace of Fan Wang”.
The first piece, performed from July 3 to 8, tells the story of a young girl embroidering in front of her poor family’s house, passing the time while her mother goes to pray at the temple. A noble young man passing by falls in love with the girl and tries to find an excuse to approach her. Seeing that this leads nowhere, he decides to drop his jade bracelet, thinking that if she picks it up, it will be a token of love and marriage. His stratagem works, the girl picks up the bracelet but is unaware that the village matchmaker has observed the entire scene. The matchmaker then decides to meddle by arranging the conveniences.
The second piece, performed from July 10 to 15, tells the sad story of a wealthy family losing members following the theft of the cosmic sword and the ensuing vendetta between two ministers at the palace and the emperor. The remaining young widow catches the interest of the emperor who, touched by her beauty, decides to make her his concubine with the approval of the girl’s father, who promises to take her to the palace. The young woman, disapproving of this arrangement, finds excuses to prevent this union but to no avail. She then has the idea, with the help of her servant, to feign madness to her father, thus avoiding the tyranny.
The third show, from July 16 to 21, tells the love story between a young noblewoman and a poor young hunter who meet at the temple. Smitten, the young woman becomes “lovesick” and suffers from not seeing this handsome stranger again. The noble brother, already having a wife, tries to lure the hunter’s mother, who must repay his loan, by deceiving her. She is not fooled and decides to take revenge by sending her son to the noble’s home to kill the old man. The plan falls apart thanks to the intervention of the sister-in-law and wife of the noble. The two lovers eventually marry.
The performances highlight important themes such as love, the victory of good over evil, betrayal and stratagems, human wickedness, and the power acquired through social rank. With varied subjects, it delights audiences of all ages, who enjoy discovering the full artistic range of the repertoire. We thus have the pleasure of witnessing all the mastery of this art (“water sleeves,” “wearing clothes skillfully,” “throwing a long braid,” “dancing with a fan”) which involves singing and the movement of eyes and body. No words are exchanged; the characters sing to communicate and speak with their gaze, gestures, and miming. Since these belong to the universal language, everyone can understand what is happening on stage: for example, that the character is opening a door, feeling tired and yawning, feigning madness, etc. During these three weeks of the Off festival, we had the opportunity to discover these three different shows featuring the main artist Wu Suzhen, who is very famous in her country. She plays the role of a virtuous woman, a mischievous and lively woman in each piece. She runs the theater school, is a first-class national actress, and holds a master’s degree in performance arts from the China Opera Academy. She stands out for her talent and radiant presence on stage.
We had the chance to ask Wu Suzhen some questions to better understand this art, little-known in France but so popular in China that it inspires admiration from all. This young woman has been practicing theater since the age of 12, training for 10 hours a day, with half an hour dedicated solely to stage movements in “small steps” (different ways of walking and moving according to the character’s gender and social class). There is not only dancing on stage but also singing, which requires very demanding and complex training, going beyond excellence. When young artists are in training, they also study other subjects such as philosophy, Chinese history, mathematics, etc. They wake up around 5 AM and finish their days at 10 PM. As this art honors Chinese tradition, Wu Suzhen’s parents are proud of their daughter; there is a very respectful view of this practice.
The younger generation is increasingly drawn to this art, especially in small villages, for several reasons. As Yu opera brings poems and the History taught in school to life, young people are delighted to discover them in another form of expression. There is also the makeup and costumes, which are just magnificent and breathtaking, that also attract them. Since their traditional culture is highlighted, the Chinese are proud of it. Finally, theater remains a living art, unlike cinema, as it happens live before their eyes.
Lastly, the clothes and accessories differ from one character to another, notably their shoes, which are of different heights and styles; we thus wondered why. Wu Suzhen told us that it depended on the characters’ social status: women wear slippers embroidered with pom-poms, while men wear heeled shoes, especially if they hold a noble position like a minister. In short, it represents social rank, and the appearance also differs according to the age of the wearer.
We were in awe of the immersion in Yu opera, an art with many facets. The artists thrive under the direction of Wu Suzhen, the main star of the troupe since 2022, and this is not about to stop. In the face of the rise of new technologies and the modernization of today’s world, we are delighted to see that theater remains a living art that continues to captivate young and old alike. The singing, the comedy, the delicacy of gestures, the nobility of the themes addressed make “Sounds of Yu” an exceptional art unique in the world that we are not ready to tire of! Thank you and congratulations to the whole team and Charlotte Calmel who presented these magnificent traditions to us.
Chinese :
今年,我们有幸第一次在帕斯捷尔空间欣赏到了来自中国的豫剧演出《豫韵》。豫剧起源于河南谷地,这种古老的艺术形式特有于中国中东部的这片地区。剧团“开封苏珍”巧妙地将戏剧、歌剧、舞蹈和美学结合在一起,彰显了传统艺术的魅力。自2022年成立以来,剧团一直致力于提供高质量的演出,旨在分享并推广豫剧的文化。以传统剧目为基础,这些作品突出展示了这一中国地区的遗产和历史。今年,剧团艺术家们希望呈现三部代表性作品:《拾玉镯》、《神剑》和《范王宫》。
第一部作品《拾玉镯》于7月3日至8日演出,讲述了一位年轻女孩在她贫穷家庭的房前刺绣的故事。她的母亲去寺庙祈祷时,她以此打发时间。一位经过此地的贵族青年爱上了这个女孩,并试图找借口接近她。见此无效,他决定故意丢下自己的玉镯,认为如果她捡起来,这将象征着爱情和婚姻。他的计策成功了,女孩捡起了玉镯,但不知道整个场景被村里的媒婆看到了。媒婆于是决定插手,安排婚事。
第二部作品《神剑》于7月10日至15日演出,讲述了一个富有家庭因神剑被盗而失去亲人的悲惨故事,以及两位宫廷大臣和皇帝之间的复仇。遗孀的美貌引起了皇帝的兴趣,他决定在女孩父亲的同意下将她纳为妃子。女孩不赞成这个安排,想方设法阻止这段婚姻但都未成功。她在仆人的帮助下,想出了假装疯癫以逃避暴政的主意。
第三部作品《范王宫》于7月16日至21日演出,讲述了一位年轻贵族女子和一位贫穷猎人在庙里相遇的爱情故事。被猎人的魅力所吸引,年轻女子因思念这位陌生人而饱受折磨。贵族兄长已有妻室,试图通过欺骗来诱惑猎人的母亲还债。但猎人的母亲识破了他的诡计,决定报复,派儿子去贵族家杀死老人。计划因贵族的弟媳干预而失败,两位恋人最终结婚。
这些演出凸显了爱情、善恶之争、背叛和计谋、人性之恶以及通过社会地位获得的权力等重要主题。不同的题材让各年龄段的观众都感到愉悦,欣赏到了豫剧艺术的丰富表现形式。我们有幸目睹了这种艺术的各种精妙技艺(“水袖”、“巧穿衣”、“甩大辫”、“扇子舞”),这些技艺通过眼神和身体动作来表达。没有语言交流,角色通过唱腔来沟通,并用眼神、动作和哑剧表演来说话。由于这些属于普遍的表达方式,所有人都能理解舞台上发生的事情:比如角色开门、疲倦地打哈欠、假装疯癫等。在这三个星期的Off节期间,我们有机会欣赏到由中国著名演员吴苏珍主演的这三部不同作品。她在每部剧中都扮演贤淑、机敏、活泼的女性角色。她是戏剧学校的校长,是国家一级演员,拥有中国戏曲学院表演艺术硕士学位,以其才华和舞台上的光辉表现脱颖而出。
我们有机会向吴苏珍提问,以更好地了解这门在法国鲜为人知但在中国备受推崇的艺术。这位年轻女性从12岁起每天练习戏剧10小时,其中半小时专门用于学习“碎步”(根据角色性别和社会阶层的不同步法)。舞台上不仅有舞蹈还有唱腔,这需要非常严格和复杂的训练,超越了卓越。年轻艺术家在学习期间还要学习其他科目,如哲学、中国历史、数学等。他们早上5点起床,晚上10点结束一天的训练。由于这门艺术弘扬了中国传统文化,吴苏珍的父母为她感到自豪,社会对这门艺术也非常尊重。
年轻一代越来越被这门艺术吸引,尤其是在小村庄,原因有很多。豫剧让诗歌和学校教的历史重现,年轻人很高兴能以另一种表达形式来了解它们。还有化妆和服装,这些都非常华丽和令人惊叹,也吸引了他们。因为这是他们的传统文化,他们为之感到自豪。最后,戏剧是一门现场艺术,与电影不同,一切都在他们眼前实时发生。
最后,不同角色的服饰和配饰也各不相同,尤其是鞋子,高度和款式各异;我们因此想知道原因。吴苏珍告诉我们,这取决于角色的社会地位:女性穿着绣有绒球的拖鞋,而男性则穿高跟鞋,尤其是那些担任贵族职位的人,如大臣。总之,这代表了社会等级,外观也因穿戴者的年龄而异。
我们对豫剧这种多面艺术的沉浸体验感到钦佩。在吴苏珍的指导下,艺术家们尽情施展才华,她自2022年以来一直是剧团的主角,这种趋势没有停止的迹象。在当今世界新技术和现代化不断发展的背景下,我们很高兴看到戏剧仍是一门不断吸引着老少观众的活的艺术。唱腔、喜剧、动作的优雅、主题的高贵,使得《豫韵》成为一种世界独一无二的杰出艺术,让人百看不厌!感谢并祝贺整个团队和向我们展示这些美丽传统的夏洛特·卡梅尔。
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